L’éducation et l’enseignement en Tunisie n’ont jamais été autant mis à dure épreuve : une crise syndicale qui fait gronder la menace, de plus en plus pesante de l’année blanche qui entraine une démotivation totale chez les élèves, Un taux de décrochage scolaire qui n’a jamais été aussi grand et une réforme de l’enseignement, qui avait pourtant été une demande pressante au lendemain du 14 janvier qui est, aujourd’hui, bloquée, ne semblant plus être la priorité.
Pourtant dans ce contexte tumultueux, à Ghardimaou, nous avons fait la connaissance d’élèves, aussi bien du primaire que du collège, qui portent encore, et de l’intérêt et un sérieux souci pour l’avenir de l’école et de l’enseignement.
L’école « LES JARDINS » , une petite école fleurie, avec un potager soigneusement entretenus par les petites mains gelées, par le froid glacial de cette région frontalière, nous a ouvert ses portes pour y découvrir des enfants plein d’entrain et d’énergie. Parmi eux, un jeune garçon de 09 ans Arken , président de la commission communication et relation extérieure du Conseil Municipal consultatif pour les enfants de Ghradimaou. Nous l’aurions raté pour rien au monde : il s’est mis sur son trente et un, sa déclaration pour les droits des enfants, sous la main, préparée sous l’encadrement du Tunisien Forum For Youth Empowrement (TFYE) dans le cadre du projet « L'iniiative aux enfants: Conseil Municipal Consultatif des Enfants », projet soutenu et financé par le PCPA Soyons Actifs/Actives.
Arken malgré son jeune âge, semble s’être pris au jeu, en accordant beaucoup de sérieux à sa mission. Ce conseil Municipal des enfants est pour lui une mission de taille, qu’il doit mener à bien, non seulement parce qu’il aime ce qu’il y fait, mais aussi pour être digne représentant de tous les enfants de Ghardimaou. Il nous explique dans un arabe littéraire, quasi parfait, que les enfants, ont droit de cité, qu’ils ont le droit, voire même le devoir de participer activement dans la chose publique. Il précise : « Nous avons un regard différent des adultes qui pourrait les aider à mieux faire les choses ». Etonnant, de voir ce bonhomme commencer son intervention par un petit bilan qui met le doigt sur une vérité incontestable : la voix de l’enfance est bafouée.
A la question qu’est ce qui a changé dans ta vie, après avoir été élu dans ce conseil, il nous répond fièrement : « Je me sens capable de porter la voix de ma région voire de tout le pays. Je voudrais qu’on m’écoute, que tout le monde le fasse ».
Quelques kilomètres plus loin, Lâayoune, le paysage change complètement, comme le climat qui devient soudain moins clément et beaucoup plus hostile. Nous sommes en haut des montagnes à quelques dizaines de kilomètres de l’Algérie. Sous un vieux chêne, grelottante, nous attend avec un sourire heureux, glacé par le froid Amal, présidente du conseil municipal consultatif des enfants. Nous n’aurons malheureusement pas eu la chance d’accompagner Amal dans sa cours de collège, ni d’échanger avec ses amis, suite à la crise syndicale, le collège a été déserté et « nous n’avons plus envie d’aller en classe » nous confie-t-elle, non sans regret.
Néanmoins, Amal ne désespère pas de passer le concours et de le réussir et d’accéder à un lycée pilote : « Je rêve toujours, sans quoi rien ne serait possible ». Cet espoir est, entre autre chose nourri, par sa participation au conseil, car participer peut changer les choses, notamment son regard sur la politique qui n’a fait que la décevoir, jusque-là.
La conscience politique d'Amal, son espoir mitigé, mais qui subsiste, grâce à l’engagement des organisations tel que le TFYE, pour les jeunes, prouvent que l’espoir de la Tunisie réside dans sa jeunesse. Cela prouve également que la solidarité, ainsi que l’engagement dans les écoles, collèges et lycées peut faire de ces derniers des espaces de vie qui initient les enfants la citoyenneté et à l’engament. Il est impressionnant de voir le souffle d’espoir et d’optimise qui règne chez les enfants. Leur participation à la vie associative et à la chose publique ne peuvent qu’être garants d’un certain idéalisme que la désillusion des adultes a fini par balayer.