A quelque kilomètres de Kasserine, au-dessous du mont « Samema », à perte de vue, des hectares de cactus: des figuiers de Barbarie. Cette région, beaucoup en auront entendu parler dans les chaînes d’informations, ou dans les journaux télévisé. En effet, elle est connue pour ses batailles entre l’armée tunisienne ou la garde nationale avec les terroristes qui se réfugient dans ses montagnes. Mais non loin, « chaîne de succès », nom du groupement agricole, a vu le jour, semblant contre-dire une actualité morose.
Sur une petite route, des dizaines de femmes s’empressent pour rejoindre un petit local planté en plein champ de figue de barbarie. Elles se retrouvent comme tous les jours ou toutes les semaines pour échanger et partager leurs expériences. Grâce à leur groupement de développement agricole, ces dernières ont réussi à transformer la figue de barbarie en différents produits telle que la confiture.
Ce groupement agricole « les chaînes de succès » a vu le jour, en 2018, notamment grâce à l’appui de l ’Association de développement de la Femme Rurale à Kasserine (ADFR) . Leur projet « l’ESS de l’engagement à l’action », appuyé et financé par le PCPA Soyons Actifs/Actives, a pour objectif la valorisation de la chaîne de valeur locale, qu’est la figue de barbarie biologique, qui permet de créer des emplois décents chez la femme rurale en situation de chômage. Ce produit de terroir recèle de nombreux trésors cachés dans ses pépins et possède d’innombrables avantages médicinaux, ce qui en fait une véritable source d’emploi et de développement locale dans la région.
L’Association de Développement de la Femme Rurale à Kasserine aura permis à ce groupement qui réunit plus de 50 femmes de comprendre et de s’approprier les valeurs de l’économie sociale et solidaire, ce qui a eu des répercussions positives sur leur situation économique. A ce propos, l’une d’elle nous confie : « Désormais, nous savons ce que veut dire économie sociale et solidaire. Nous ne serons plus exploitées par les commerçants. Nous préférons vendre du producteur au consommateur. ». Grâce à ces formations, les femmes ont pu aussi étendre leurs activités tout au long de l’année, au delà des deux mois de cueillette. En transformant les fruits, elles arrivent à pérenniser leurs rentrées d’argent ce qui pour elle représente une véritable manne financière.
Ghofrane Assidi, a fait des études universitaires en Agronomie. Bien décidée à faire profiter sa région de son expertise, elle est revenue à Zelfene, déterminée à créer ce groupement agricole. D’après ses dires, il ne s’agissait pas uniquement « d ‘améliorer la situation économique des femmes » mais aussi de participer activement à leur émancipation. Avec le sourire, certaines nous expliquent que grâce à cette initiative, elles ont pu sortir de leurs maisons - qu’elles ne quittaient presque jamais, et voir de niveaux horizons se profiler. Toutes et d’une voix unie, elles disent qu’elles n’ont rien à envier aux « citadines » qui travaillent. Elles veulent en découdre avec une société patriarcale qui a fini par les confiner aux tâches ménagères et agricoles sans leur offrir l’encadrement et les connaissances nécessaires pour être complètement libres. Ces 50 femmes ont même fini par convertir leurs maris et les hommes de Zelfene qui ont fini par adhérer au projet et par les soutenir activement, puisqu’ils les aident aujourd’hui à commercialiser leurs produits avec un meilleur prix.
Aujourd’hui, grâce à cette initiative, il n’est plus à prouver la nécessité et les conséquences positives d’une économie sociale et solidaire. Certes, ce secteur est économiquement prometteur mais ses bienfaits vont bien au-delà : une émancipation et un changement de mentalités qui créent de nouvelles valeurs plus démocratique qui permettent à la chaîne du succès de devenir une véritable chaine d'espoir pour d'autres régions .